Dimanche 18 Juin prochain, pas d’alternative : il faudra voter pour Jerry Lewis sur Arte. La chaîne Franco-Allemande diffusera à 22h50 Jerry Lewis clown rebelle, un documentaire inédit et passionnant sur une des figures incontournables de la comédie américaine depuis plus de 60 ans.
En 2016, Jerry Lewis fêtait ses 90 printemps, l’occasion pour nous de revenir sur une carrière exemplaire, qui a jalonné et façonné la cinéphilie de beaucoup d’entre nous [lire notre article]. Grâce au film réalisé par Gregory Monro, Jerry Lewis clown rebelle (Jerry Lewis: The Man Behind the Clown pour le marché international), nous franchissons un cap dans notre connaissance de l’artiste au corps élastique.
Clown, Jerry Lewis l’est indubitablement. Dans la droite lignée de ses maîtres Charlie Chaplin, Buster Keaton ou Stan Laurel, il s’est toujours inscrit dans la plus pure tradition de l’âge d’or de la comédie et du burlesque, plaçant au centre même de son cinéma ses numéros de pantomime qui feront de lui, après plus de 50 films, l’un des comiques les plus influents du 7ème Art.
Rebelle, Jerry Lewis le fut, notamment dans son propre pays, qui ne comprit jamais rien à son génie, ne voyant en lui qu’un pitre quand les Européens, Français en tête, le considéraient, à juste titre, comme un auteur à part entière, un véritable visionnaire dans un domaine trop souvent fermé aux élites culturelles.
Quoi de mieux qu’un documentaire vu du côté européen, du côté d’un passionné, Gregory Monro, déjà à l’origine du très bon Monsieur de Funès en 2013 ? Le film évite ainsi tous les écueils admiratifs du précédent documentaire venu des États-Unis, Method to the madness of Jerry Lewis de Gregg Barson. Selon Gregory Monro, « le principe n’était pas de mettre à l’écran une pléiade de stars américaines qui encense l’artiste, mais davantage de prendre du recul, essayer d’être plus critique et tenter de comprendre ce que peut endurer un comique incompris dans son propre pays. » Mission réussie !
Le documentaire commence par un superbe et original générique sur le rythme effréné du sketch de la machine à écrire, un classique indémodable de Jerry Lewis. Le ton est donné. Puis, durant les 60 minutes du film, s’enchaînent des interviews inédites de personnalités et d’experts, tels le comédien Sean Hayes (qui a joué le rôle de Lewis en 2002 dans le téléfilm Martin et Lewis), l’acteur et réalisateur français Pierre Étaix, son imitateur célèbre Tony Lewis, le critique de film Jonathan Rosenbaum, l’historien du cinéma Ted Okuda (auteur de The Jerry Lewis Films) ou encore le réalisateur Martin Scorsese (qui a travaillé avec Jerry en 1982 sur La Valse des pantins). Également à l’honneur, une rencontre avec Robert Benayoun, grand spécialiste du comique, ainsi qu’un passage étonnant où Jean-Luc Godard parle avec lucidité et adoration du sens de la géométrie de Jerry Lewis. Une archive incroyable !
Truffé d’images rares et souvent inédites, de témoignages et d’extraits de films intelligemment agencés, le film s’attarde avec passion sur cet artiste hors-normes, de ses premiers émois de comique sur scène dès l’âge de 5 ans à sa rencontre déterminante avec le crooner Dean Martin. Après une jolie carrière tant sur scène que sur grand écran, le tandem Martin/Lewis se sépare en 1956, engendrant « le pire divorce de l’histoire du show-biz ». Jerry Lewis va finalement « renaître », seul, et faire évoluer son personnage durant une vingtaine d’années. Après s’être rôdé aux côtés de son mentor le cinéaste Frank Tashlin, il aborde à 34 ans son premier film, Le Dingue du Palace (1960), en tant qu’auteur, réalisateur et interprète, ce qui le rapproche un peu plus de son maître absolu, Charlie Chaplin.
Lors des cinq dernières minutes du documentaire teintées d’émotion et de tendresse, Jerry Lewis avoue que la caméra a toujours été sa « plus belle histoire d’amour ». Il confie également son amour pour son ami Dean Martin : « Il était bien plus qu’un frère, qu’un père, qu’une mère. Il a été la personne la plus proche dans ma vie. Il me manque toujours autant depuis sa mort. Je pense à lui tous les jours. » Enfin, il rend grâce au public : « J’ai toujours écrit pour amuser les gens. Chaque scénario a été conçu pour divertir le public. Je suis nostalgique de tout. Pas d’une chose, de plein de choses. J’ai eu beaucoup de chance. Une existence pleine de moments merveilleux. Quelle chance. Je suis gâté. J’ai eu l’opportunité de gagner le cœur du public. Et la clé, dans tout ça, c’est l’amour. Si vous aimez votre public, il vous le rendra. »
Jerry Lewis clown rebelle
un film de Gregory Monro
Diffusion : dimanche 18 juin à 22h50 sur Arte
En Replay jusqu’au 26 juin : cliquez ici pour le Replay
par Emmanuel Gauguet