Après une dizaine d’ouvrages aux sujets variés (dont plusieurs fictions), l’incontournable Daniel Prévost se lance – enfin – dans une autobiographie principalement axée sur sa carrière professionnelle, à la radio, à la télévision, ainsi qu’au cinéma : « Entre deux éclats de rire, j’ai travaillé d’arrache-pied. En voici les preuves, elles sont nombreuses et je n’en oublierai aucune ! »
En résultent une succession de pensées, souvenirs et autres anecdotes, dont on se régale de la première à la dernière page : « Dans la magnifique carrière que j’ai eu le plaisir et la joie d’exercer, écrit-il, il m’arriva diverses aventures que je me dois de notifier. Et quand j’y repense, ce métier, que l’on nomme « métier », n’en est pas un, juste une occupation dérisoire pour le jeune homme paresseux que je fus. »
Parmi les films abordés, ceux écrits et réalisés par son fidèle complice Jean Yanne (Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil et Les Chinois à Paris principalement) figurent bien entendu en excellente position, mais n’évincent par pour autant d’autres classiques, tels que Elle court, elle court la banlieue (Gérard Pirès, 1973), Le Dîner de cons (Francis Veber, 1998) et La Vérité si je mens ! 2 (Thomas Gilou, 2001) : « J’ai eu la chance de faire du cinéma, avec la même prestation : des personnages fourbes, antipathiques, sournois, menteurs, violents, hargneux, toute une panoplie des êtres humains que chacun de nous a rencontré au moins une fois dans son existence. »
Il arrive aussi au comédien de ne pas citer le titre d’un long-métrage, ni même le nom d’un metteur en scène, lorsque le souvenir s’avère plus amer (et néanmoins irrésistible) : « J’étais invité à une projection privée d’un de mes films que je savais médiocre et j’assistais médusé aux images qui défilaient devant moi (…) Quand le film fut terminé et que la lumière se ralluma, je me dépêchai de me lever de mon siège et je courus presque vers la sortie de la salle de projection. C’est alors que le réalisateur, bien présent à la porte de la salle, me barra le passage et dit : « Alors ! J’aimerais bien savoir ce qu’en dit mon ami Prévost ! » Je ne sais ce qui me prit soudainement, je le regardai droit dans les yeux et commençai doucement : « Épatant ton film, épatant ! » J’ajoutai : « Peut-être un peu long, sinon ça va ! Mais je crois que tu devrais couper un petit peu, cinq minutes. Non un quart d’heure, un quart d’heure non, c’est pas assez, disons tu coupes tout, c’est nul, c’est à chier ! C’est pour ton bien, pour le bien du film que je te dis ça, hein ?! » »
Daniel Prévost en profite également pour régler quelques comptes (Philippe Bouvard), témoigner d’une époque révolue (Georges Descrières empoignant les seins d’une jeune assistante sur un plateau de tournage)… sans oublier de rapporter d’élogieux – et mérités – propos à son égard (« Vous, vous êtes un bon ! » dixit Bernard Blier).
Un ouvrage à la fois drôle et décapant, tendre parfois, et le tout enrobé d’une réelle sensibilité. Du Prévost tout craché !
par Gilles Botineau
Autobiographie de moi par moi
de Daniel Prévost
Éditions Le Cherche Midi – 160 pages
Parution : 12 mai 2022